De l'urgence au répit : Répondre aux besoins de garde complexes chez Dépann’ Familles
Depuis plus de trois décennies, Dépann’ Familles s'impose comme un acteur central dans le domaine de la petite enfance à Grenoble et en Isère. L'association s'engage à satisfaire les besoins de garde complexes : les situations d'urgence ou les gardes en dehors des horaires conventionnels.
Son engagement s'étend aux familles en situation de vulnérabilité ainsi qu'aux enfants ayant des besoins spécifiques en raison d'un handicap. Une micro-crèche AVIP (à vocation d’insertion professionnelle) et un service d'accueil d'urgence avec des horaires non conventionnels ont récemment vu le jour à Fontaine, en périphérie de Grenoble.
Certains parents ont la chance de disposer d'un réseau de soutien, tandis que d'autres en sont dépourvus. C'est pour apporter un soutien aux parents dans les situations complexes du quotidien que l'association Dépann’ Familles a été fondée en 1991.
Initialement, elle a proposé un service de garde à domicile à Grenoble et dans ses environs, pour les enfants de 0 à 6 ans, couvrant toutes les situations d'urgence et de fragilité (maladie d'une assistante maternelle, fermeture de crèche, maladie de l'enfant, hospitalisation, rendez-vous crucial sans solution de garde, reprise d'activité, etc.). Une intervenante qualifiée, détenant des diplômes en petite enfance et formée pour ce type d'accueil particulier, prend en charge l'enfant à domicile. Les tarifs varient selon les revenus des familles, mais de nombreuses familles se trouvent en situation de précarité. « Plus de 50 % des familles sont dans les tranches de revenus les plus basses », souligne Henriette Nallet, la directrice de l'association. L'intervention de Dépann’ Familles s'étend aussi bien dans les quartiers du centre-ville que dans les Quartiers Prioritaires de la Ville (QPV), offrant une diversité de services.
Répondre au besoin de répit pour les enfants en situation de handicap
En 2001, l'association a été sollicitée par des parents d'enfants en situation de handicap. « Pour répondre à leur demande, nous avons constitué une équipe d'éducateurs spécialisés pour intervenir à domicile », se souvient Henriette Nallet. À l'époque, la directrice était elle-même une éducatrice spécialisée ayant un réseau actif dans le domaine de l'autisme. L'association a depuis maintenu son engagement envers ces familles.
Grâce à ce service, les domaines d'intervention de Dépann’ Familles se sont élargis. L'association intervient désormais auprès d'enfants et de jeunes de 3 à 20 ans, présentant une reconnaissance de handicap. Les interventions peuvent se dérouler de manière discontinue au cours de la journée, ce qui permet aux parents de poursuivre leur activité professionnelle sans être interrompus par un rendez-vous chez l'orthophoniste, par exemple. Une autre possibilité est de débuter tôt le matin un jour de semaine, même si cela ne correspond pas aux horaires habituels de l'enfant. « Nous pouvons également intervenir régulièrement une demi-journée par semaine, pour permettre au parent de s'occuper de l'enfant d'aller faire des courses, se reposer ou passer du temps avec un autre enfant », précise Henriette Nallet.
Ces moments de répit sont essentiels pour les parents, tout en offrant un soutien éducatif et familial. La directrice constate que « dans de nombreuses situations, les enfants n'ont pas de prise en charge, ou celle-ci est extrêmement limitée ». L'idée de répit s'est popularisée au fil des années, d'autant plus depuis que la Caisse d'Allocations Familiales (CAF) a ajouté le soutien au répit parmi ses motifs de financement.
Des horaires atypiques pour répondre à l'urgence
En 2011, Dépann’ Familles a répondu à un appel à projet national dans le cadre d'Espoir Banlieues, concluant une convention avec la CAF pour répondre aux besoins d'accueil en horaires atypiques. Les intervenantes ont désormais la possibilité d'intervenir tôt le matin et tard le soir, ce qui permet de faire face à des situations d'urgence, de reprise ou de maintien d'une activité professionnelle, de travail en horaires non conventionnels, de répit et d'accompagnement éducatif. Ces services viennent en complément des modes de garde existants, avec une amplitude horaire plus étendue (jusqu'à 80 heures).
Des intervenantes spécialement formées pour les situations d'urgence
Les professionnelles intervenant à domicile sont diplômées, généralement titulaires d'un CAP AEPE (Accompagnant Éducatif Petite Enfance) ou possédant une expérience significative en tant qu'assistante maternelle. Elles bénéficient également d'un encadrement et d'un suivi particuliers, incluant trois réunions d'équipe chaque mois avec des analyses de pratiques. Cette démarche favorise une véritable professionnalisation de l'équipe et assure un accompagnement continu. Il est important de prendre en compte la complexité des interventions. « Travaillant à des horaires atypiques, elles peuvent par exemple arriver à 6h30 chez une famille qu'elles n'ont jamais rencontrée », décrit la directrice. Souvent, elles n'ont eu qu'un échange téléphonique avec le responsable du service, qui a tenté de préparer la famille et d'expliquer à l'enfant la situation à venir. Cela peut se traduire par le réveil d'un enfant inconnu, la préparation du petit-déjeuner dans un environnement inconnu, ou encore l'accompagnement à l'école avec un enfant réticent, parfois dans des contextes interculturels avec des aliments peu familiers. Toutes les intervenantes sont formées et encadrées pour gérer ces situations délicates, et les analyses de pratique facilitent le partage des expériences pour une meilleure réponse collective.
Une micro-crèche AVIP en horaires atypiques et d'urgence
En 2022, Dépann’ Familles s'est installé à Fontaine, en périphérie de Grenoble, dans de nouveaux locaux et a inauguré Les Ecrins, une micro-crèche en harmonie avec les principes d'accueil de l'association. Cette structure propose six places pour répondre aux besoins urgents ou temporaires, accueille des enfants en situation de handicap et dispose également de six places AVIP. Toutefois, il est essentiel de garder à l'esprit que l'ensemble des activités de Dépann’ Familles reste orienté vers le dépannage, et l'objectif est d'orienter les familles vers des solutions plus stables et pérennes en termes de garde. Ainsi, les contrats sont établis pour une durée de trois mois, avec un renouvellement soumis à certaines conditions.
Recrutement et gestion des horaires, des défis complexes
Avec un fonctionnement aussi adaptable et des horaires aussi atypiques, la gestion du personnel se révèle être un défi complexe pour Dépann’ Familles. L'association emploie six professionnels pour la crèche, dix éducateurs pour le service handicap (travaillant entre 10 et 20 heures par semaine), ainsi que cinq professionnels (maximum 20 heures par semaine) pour le service petite enfance. Henriette Nallet déplore que ces effectifs soient largement insuffisants, et le recrutement s'avère être une tâche ardue. Les activités sont principalement concentrées le matin et le soir, avec moins d'interventions en journée. Pour pallier cette situation, des partenariats ont été établis avec des crèches pour les remplacements en journée. La directrice explique que l'association a réalisé qu'elle contribuait involontairement à la précarisation de son personnel. Cette prise de conscience a contribué à l'idée de créer la crèche. Aujourd'hui, la moitié de l'équipe travaille à domicile, tandis que l'autre moitié répartit son temps entre la crèche et les interventions à domicile.
Main dans la main avec les communes
Malgré plus de trente ans d'existence, Dépann’ Familles demeure une structure fragile, confrontée aux difficultés de recrutement. Selon la directrice, l'une des forces de l'association a été d'établir rapidement des conventions avec les communes, permettant de financer quelques heures d'accueil à des tarifs plus abordables pour les familles. Ces conventions vont de 20 heures jusqu'à 400-500 heures prises en charge par les communes. Cependant, renforcer ces partenariats est devenu nécessaire aujourd'hui, car « cela continue encore, mais cela fonctionne plus ou moins bien », observe Henriette Nallet. D'autres sources de financement se sont accumulées, ce qui peut parfois rendre complexe le moment de faire appel aux communes. À Grenoble, où le Centre Communal d'Action Sociale (CCAS) pilote la politique petite enfance de la ville, aucune convention n'a été signée entre Dépann’ Familles et la commune. La directrice explique que le CCAS souhaite conserver la main et considère Dépann’ Familles comme un simple prestataire de services. Cependant, malgré les difficultés budgétaires fragiles auxquelles l'équipe administrative doit faire face, Dépann’ Familles ne manque pas de projets et d'ambitions pour soutenir les familles les plus vulnérables.
Crédit : Lesprosdelapetiteenfance.fr